Le caractère tragique de la fin de journée ce dimanche au Rallye du Condroz-Huy a renvoyé les considérations sportives au second rang. Logique. Et en même temps dommage, car les acteurs arrivés au bout de cette 48ème édition méritaient tous les éloges. Sur des spéciales au grip de plus en plus précaire après l'apparition de la pluie, Nikolay Gryazin a démontré qu'il est un 'grand' du rallye mondial. Son duel contre Stéphane Lefebvre, à coups de dixièmes de seconde, était ahurissant d'intensité. Deux pilotes de classe internationale, qui nous ont fait vibrer comme jamais...
Il y a aussi Adrian Fernémont, 'notre' double champion. Qui ne lâche jamais rien, dont l'expression aux différents TRC en dit toujours très long sur ce qu'il vient de vivre et réaliser. 'Adri' ne lâche jamais rien, et il n'est guère aisé de le déstabiliser. Après le saut avec réception sur le nez dans le premier passage de Verlaine-Jehay 1, d'aucuns auraient déposé les armes. Pas lui. Gryazin le clamait à la fin de la première journée : "Those stages are made for brave people". Et Fernémont est un brave parmi les braves...
Mais ce week-end, à Huy, un pilote mérite tous les qualificatifs, tous les superlatifs ! En arrachant - le terme n'est pas trop fort - la 2ème place finale sous la pluie dimanche après-midi, Cédric Cherain a parachevé un week-end de toutes les folies ! Un week-end au cours duquel il a tout simplement été 'Magic'. Le terme fera sans doute bondir certains puristes, mais ce Cédric-là le mérite amplement. Son pilotage, avec une mécanique puissante, mais deux roues motrices seulement, relevait de l'excellence. L'artiste était sur un fil permanent, il n'en est jamais tombé.
S'il a remporté des épreuves au cours de sa carrière, au Condroz, Cherain a sans doute livré l'une de ses meilleures prestations absolues ! Cette Porsche 997 GT3 August Racing, fruit du savoir-faire de Lionel Hansen, Cédric l'a domptée en faisant fi du fait qu'au Condroz, il est impossible de réellement se distinguer avec deux roues arrière motrices.
Cher Cédric, on se connaît depuis pas mal de temps, on se croise régulièrement, et ton côté explosif m'a toujours beaucoup amusé. Au volant comme dans la vie. Un vrai personnage. Avec un caractère aussi séduisant que parfois irritant. Ce week-end, pour le dire vulgairement, tu as 'troué le cul' à tout le monde. On savait qu'une Porsche pouvait parfois rivaliser avec les Rally2, comme Gunther Monnens et toi l'aviez encore démontré récemment. Mais semer la zizanie dans le top 3 d'un Condroz avec cette machine dépasse quelque part l'entendement. 'Insane', comme disent les Britons...
En début de saison, lors de la présentation officielle du programme August Racing, Lionel Hansen nous avait expliqué pourquoi il pensait qu'une 997 GT3 était meilleure qu'une 991 GT3 sur les parcours du BRC. A condition évidemment de mettre un surdoué au volant. Avec Cédric Cherain, August a mis dans le mille. Ce qu'il fallait au Liégeois, c'était un défi à l'image de son personnage. Il l'a trouvé...
Le prochain objectif de Cherain est on ne peut plus limpide : taper toutes les Rally2 au classement général d'une épreuve. Il y parviendra. On ne sait pas quand, où, mais il y a des indices.
Ce week-end, Damien Withers, copilote de Cédric, a sans doute vécu des trucs qui relèvent de l'improbable. A ce gaillard qui n'est pas un professionnel du copilotage, on tire aussi un immense coup de chapeau.
By the way, si Cédric Cherain avait bénécié d'une position de départ moins pénalisante samedi, l'histoire aurait peut-être été encore plus belle. Mais avec des si... En attendant, les larmes de Cédric au dernier TRC démontraient qu'il venait de tout donner deux jours durant, et qu'il était temps que la pression retombe. 'Magic' Cédric... (Vincent Franssen / Photos Pascal Verheuge & Michael Mathieu)