Après une séance de dédicaces et une parade plus populaires que jamais avec des milliers de spectateurs arpentant l'artère principale de Bastogne vendredi soir, les Legend Boucles ont véritablement démarré samedi matin sur des spéciales détrempées et boueuses à souhait suite à la fonte des neiges de la veille. A froid, dans des conditions d'adhérence encore précaires, c'était François Duval le mieux réveillé Le pilote de la Ford Escort MK1 8 soupapes à voies étroites signée Burton Racing signait le premier scratch de la journée. Mais, gêné dans l'ES2 après avoir rattrapé une Demo dans la boucle de Mirwart, Dudu ne pouvait ensuite plus suivre le rythme imprimé par la puissante Porsche 911 Groupe 4 BMA de Bernard Munster.
"Comment voulez-vous lutter avec cent chevaux de moins ?, soulignait le pilote de Cul-des-Sarts, déjà très heureux de sa 2ème place à mi-journée. Je n'attaque pas trop non plus car il ne faut pas oublier que cette auto est une grand-mère. Mais je m'amuse beaucoup et les spectateurs ne doivent pas être déçus de nos passages."
Le retard de notre ex-vainqueur en Mondial culminait à 44 secondes avant les quatre ultimes spéciales de nuit où le classement allait être complètement bouleversé. Derrière, mais aussi devant.
A la lueur des phares, parfois dans le brouillard, François rappelait à tout le monde qu'il a été un des meilleurs rallymen mondiaux en signant quatre meilleurs temps successifs. Grappillant par grosses poignées de secondes son retard sur la Porsche de Munster, le pilote de l'Escort reprenait la tête de l'épreuve pour 7 secondes à l'issue d'une dernière RT de folie disputée sur un tapis blanc. "C'est vraiment limite par endroits. Je ne voyais plus les traces de la voiture de Bernard parti une minute plus tôt. On a rattrapé une Subaru 'Démo' partie 6 minutes avant moi. On s'est régalé. Demain on verra comment sont les conditions météorologiques. A priori, la Porsche motrice mieux sur la terre. C'est tout en secret avec trois nouvelles spéciales où le sens de l'improvisation sera important. J'ai hâte d'y être."
Après un départ prudent, Bernard Munster avait pris le meilleur sur Duval dès l'ES3 et creusé progressivement l'écart sur ses poursuivants grâce à six scratches. Mais il allait tout perdre de nuit... "Tout a fonctionné parfaitement jusqu'à la tombée de la nuit , racontait le vainqueur de l'édition 2016, déjà sur Porsche. Dans des conditions très délicates, avec une visibilité réduite, j'ai d'abord fait deux tête-à-queue puis perdu du temps dans la dernière en rattrapant la Subaru partie 5 minutes avant moi. François en a profité pour reprendre le leadership. Voilà qui augure une superbe bagarre pour ce dimanche sur la terre. Comme en 2015 où j'avais échoué pour moins d'un point derrière lui. J'ai une revanche à prendre."
Surprise de cette première moitié de rallye, Frédéric Bouvy aurait dû être le premier leader. « Mais il y a eu un souci au départ avec le starter, sans cela on signait facilement le scratch, » expliquait le Bruxellois dont la Porsche dotée d'un puissant moteur 3,4 litres écope d'un léger handicap correcteur de 1,05 comme tous les voitures d'après 1981. Troisième durant une bonne première partie de la journée, Fred perdait toutefois trois places suite à une petite sortie dans Chevron-Rahier. « Aujourd'hui on a roulé tranquille, mais demain on va se lâcher sur la terre. J'aimerais bien récupérer cette troisième place. »
Un podium qu'aurait pu revendiquer l'ancien lauréat Stefaan Stouf, très spectaculaire sur son Escort MK1 BDA. Mais une crevaison dans l'ES5 de Whitimont lui coûtait près de 4 minutes, quasi le même temps abandonné par un autre ancien triple vainqueur, Renaud Verreydt (Ford Escort MK1), obligé de disputer les deux premiers RT au ralenti avec une transmission défectueuse. Ce soir, le renard, auteur de quelques chronos de très belle facture en début de soirée, était déjà revenu en 12ème position.
On retrouvait dès lors aux 3ème et 4ème rangs les deux Escort MK2 BDA Groupe 4 de Christophe Jacobs, le régional de l'étape Fred Caprasse, dans un grand jour et très spectaculaire (il pointe à 2'10 de Duval) précédant de 53 secondes son illustre équipier Bryan Bouffier, pilote officiel Ford lors du dernier rallye Monte-Carlo. "Je m'amuse vraiment bien. J'ai mis un peu de temps à trouver le bon rythme et j'ai dû composer avec un copilote malade en raison d'émanation d'essence dans l'habitacle, expliquait le Français. Ma méconnaissance du terrain devrait constituer un moins grand handicap lors de la deuxième étape totalement secrète."
Derrière ces deux-là, on soulignait l'excellent classement de Romain Delhez sur son Opel Kadett GT/E. Ce dernier précédait donc Fred Bouvy (Porsche 911) et Tim Pearcey (Ford Escort MK2). Le Britannique compte bien sur son expérience du RAC pour reprendre encore quelques places lors de la seconde étape. Le pilote d'outre-Manche devançait la famille de Mevius, Ghislain (Nissan 240 RS Gr.B) doublant son papa Grégoire (Porsche 911 Gr.4) dans l'ultime tronçon sous la neige disputé avec un souci d'essuie-glace pour l'ex-champion du monde Groupe N avouant "manquer de compétition et s'être montré trop prudent tout au long de la journée. Mais je suis venu pour la terre..."
Le Français Jean-François Mourgues (Mazda RX-7) perdant beaucoup de temps suite à divers petits soucis (de phares notamment) sur sa Mazda RX-7 Groupe B, la BMW 323i de Jean-Pierre Van de Wauwer complétait un Top 10 au sein duquel tout pouvait encore changer ce dimanche lors de la tant attendue étape sur terre avec au menu 7 spéciales différentes et 96 kilomètres.
Neuville autoritaire leader hors classement
Et la vedette Thierry Neuville ? Assailli par des centaines de supporters dès le vendredi soir, notre triple vice-champion du monde se faisait plaisir et régalait les dizaines de milliers de spectateurs au volant de sa petite mais très performante Opel Corsa A hybride évoluant hors classement pour utiliser plusieurs éléments (surtout le moteur Kit-Car 1.6 de 185 chevaux) loin d'être d'origine.
Mais, contrairement à Bruno Thiry assurant le show dans une 'Démo' quasi exclusivement Subaru, Thierry évoluait au milieu des 'Legend'. Et si ses chronos (il s'est montré cinq fois plus rapide que toutes les 'Legend') ne comptaient pas pour du beurre, il possèderait ce soir près d'une minute d'avance sur l'Escort nettement moins moderne il est vrai de François Duval. "C'est gai de rouler ainsi sans aucune pression, souriait notre ambassadeur en Mondial secondé par Nicolas Gilsoul. L'auto fonctionne vraiment très bien. Cela pousse moins que ma Hyundai mais on est plus secoués. Je suis vraiment très heureux de ma dernière acquisition et j'ai hâte de découvrir son pilotage sur la terre ce dimanche."
Le nombreux public des Legend Boucles aussi...
Rappelons que ce dimanche matin, la longue caravane de plus de 230 voitures s'élancera à 7h40 avec d'abord les concurrents 'Classic', de 30 en 30 secondes, puis les 'Demo', les 'Legend' et les 'Challenger' de minute en minute. (Vincent Franssen & Com / Photos Jacques Letihon)
Legend Boucles à Bastogne 2018 / Classement officieux
1. Duval-Leyh (Ford Escort MKI) 283 points ; 2. Munster-Humblet (Porsche 911) à 7 pts ; 3. Caprasse-Razzi (Ford Escort MKII BDA) à 130 pts ; 4. Bouffier-Alnet (Fra/Ford Escort MKII) à 183 pts ; 5. Delhez-Bonaventure (Opel Kadett GTE) à 191 pts ; 6. Bouvy-Hottelet (Porsche 911) à 197 pts ; 7. Pearcey-Shanks (GB/Ford Escort MKII) à 312 pts ; 8. Gh de Mevius-Jalet (Nissan 240 RS Gr.B) à 337 pts ; 9. G. De Mevius-Louka (Porsche 911) à 341 pts ; 10. Van de Wauwer-Surinx (BMW 323i) à 343 pts ; 11. Leyon-Deposson (Ford Escort MKI) à 368 pts ; 12. Verreydt-Elst (Ford Escort MKI) à 383 pts ; 13. G. Mondron-Werner (Porsche 911) à 394 pts ; 14. Griffiths-Jones (GB/Ford Escort BDA) à 396 pts ; 15. Mourgues-Prévot (Fra-Bel/Mazda RX7 Gr.B) à 407 pts, etc.