On dit souvent du sport automobile que c’est un virus dont il est très difficile de se défaire. La vitesse, l’adrénaline, la maîtrise, le dépassement de soi, la compétition… C’est très addictif ! Ce n’est certainement pas Charles Vanstalle qui nous contredira. À 84 ans, celui qui est connu sous le pseudonyme 'Chavan' ne parvient pas à raccrocher le casque. Le 1er février, le Verviétois sera une fois encore au départ des Legend Boucles @ Bastogne. Au volant de sa Volkswagen Golf II GTi de 1985, il sera engagé dans la catégorie Classic 65 avec Maxime Maas comme copilote.
"Si on regarde l’histoire, c’est en réalité la 40e fois que je serai au départ de ce rallye, explique ce membre du Belgian VW Club. Les Legend Boucles sont en effet la continuité des épreuves qui s’appelaient Les Routes Blanches puis les Boucles de Spa, un rallye que j’ai d’ailleurs gagné deux fois au classement général : en 1968 comme copilote et en 1970 comme pilote."
Chavan, c’est évidemment la contraction de Charles Vanstalle. L’utilisation d’un pseudonyme était chose courante dans les années ‘60, souvent pour cacher à son entourage que l’on pratiquait un sport coûteux et dangereux. "Dans mon cas, j’étais employé dans un bureau d’assurance et c’est mon patron qui ne voulait pas que je fasse du sport automobile, se souvient Charles. J’en ai donc fait en cachette, en me faisant appeler Chavan. Quand j’ai décidé de le quitter pour créer ma propre entreprise, il s’est auto-félicité en me disant que, grâce à lui, je n’avais pas perdu mon temps avec la course automobile et que c’est pour cela que je faisais une si belle carrière professionnelle. Je lui ai alors sorti toutes les coupures de presse parlant des performances de Chavan… Je dois dire qu’il a été assez surpris !" (Il rit, NDLR)
Dès qu’il commence la compétition par des courses de côte en 1962, le jeune Chavan marque les esprits. Sur sa Coccinelle personnelle, voiture qu’il utilise quotidiennement pour se rendre au travail, le Verviétois signe d’emblée des résultats de choix. "Pourtant, ma Cox était strictement de série, insiste Charles. À l’époque, même l’arceau de sécurité n’était pas obligatoire ! Mon moteur 1200cc développait 34 chevaux et cette voiture était un peu capricieuse quand on la menait à la limite, mais je parvenais à me battre avec des voitures plus performantes."
Une Volkswagen 1500S officielle
Tout en continuant les courses de côte, avec un titre de champion de Belgique des moins de 1300cc en 1963, Chavan ajoute le rallye la même année, en commençant par les 12 Heures de Huy, l’ancêtre du Rallye du Condroz. "La discipline était alors bien différente de ce que l’on connait aujourd’hui !, rappelle-t-il. Il n’y avait pas de spéciales. Nous roulions sur des routes ouvertes à la circulation, avec des moyennes horaires imposées qui étaient très difficiles à respecter. Il y avait moins de trafic qu’aujourd’hui, mais c’était fou quand on y repense…"
Participant notamment au Tour de Belgique 1963, Chavan termine 9e du classement général et 2e de sa catégorie. Ses performances incitent certains propriétaires à lui prêter des montures de plus en plus performantes. Et en 1965, année qui verra d’ailleurs la naissance du Belgian VW Club pour promouvoir le sport automobile au sein de la marque, c’est Volkswagen qui lui confie sa première voiture dite 'officielle'. "Lors des Routes Blanches, j’avais devancé avec ma Coccinelle le pilote VW, se rappelle-t-il. Ils avaient alors décidé de mettre à ma disposition une des Volkswagen 1500S qui avaient disputé les 24 Heures de Francorchamps en 1964 (un récit à lire sur le site du Belgian VW Club, NDLR). Avec cette voiture, dont le moteur préparé développait 75 chevaux au lieu des 55 de série, j’ai remporté ma catégorie aux 12 Heures de Huy, puis au Tour de Belgique. Je l’ai conservée deux ans."
Changeant de monture en fonction de ce qu’on voulait bien lui prêter, Chavan a été capable de briller dans toutes les disciplines… et à tous les postes. Ses victoires aux Boucles de Spa en 1968 en tant que copilote de Jean-Marie Jacquemin puis en tant que pilote deux ans plus tard le prouvent. Ajoutez-y un succès au général lors des 24 Heures de Spa-Francorchamps en 1976 et vous avez là un palmarès qui a de quoi faire des envieux.
Si elle ne fut pas la seule, la marque Volkswagen aura souvent été liée à Chavan. Le clin d’œil à l’histoire est d’ailleurs amusant : soixante-trois ans après la Coccinelle, c’est sur sa Golf II GTi que Chavan sera encore au départ à Bastogne ces 1er et 2 février. "J’ai souvent dit que ce serait mon dernier rallye, mais j’ai toujours une bonne excuse pour replonger…", sourit-il. Ses parents l’avaient prénommé Charles, mais dans le sport automobile il restera toujours Chavan ! (Vincent Franssen & Comm / Photos Rémy Nuits & archives René Beyers)